Sévère Alexandre : né à Arca (Tell Arqa) en Phénicie syrienne (aujourd'hui dans le Nord du Liban) et nommé Alexianus; mort le 18/19 mars 235 à Moguntiacum (Germanie sup.)Titre : Imperator Caesar Marcus Aurelius Severus Alexander Pius Felix Augustus (11 mars 222 - 18/19 mars 235 : 13 ans et 7/8 jours)Nom
Gessius Bassianus Alexianus. En 221, lorsqu'il est nommé César, il reçoit les noms de Marcus Aurelius Severus. Il transforme le nom d'Alexianus en celui d'Alexander en hommage à Alexandre le Grand, dont il est un fervent admirateur. NaissanceLe 1er Octobre ou le 12 décembre 205, à Césarée en Phénicie. FamilleOriginaire d'Emèse, sa famille sacerdotale vouée au culte du Dieu Baal. Elle est apparentée à la famille des Sévères par l'impératrice Julia Domna, épouse de Septime Sévère. Sa soeur, Julia Maesa, a deux filles, Julia Soaemias et Julia Mammaea. PèreGessius Marcianus, ancien procurateur, d'origine syrienne. MèreJulia Mammaea est toute aussi ambitieuse et intrigante que sa soeur Julia Maesa, mère d'Elagabale. PortraitGrand, fort, sportif, bon fils, bon élève, modéré, travailleur selon les biographes anciens qui en font le modèle du souverain idéal. En réalité, il semble que Sévère Alexandre est plutôt un bon garçon sans envergure et absolument nul sur le plan militaire. MariageSévère Alexandre épouse, avec le consentement de sa mère, une fille de patricien. L'Histoire Auguste l'appelle Memmia, fille de Sukpicius. Les inscriptions et les monnaies frappées entre 225 et 228 la nomment Cn. Seia Herrenia Sallustia Barbia Orbiana et lui confèrent le titre d'Augusta. Comme le rapporte Hérodien, "si la mère de l'empereur accablait d'outrages sa belle-fille, c'est parce qu'elle-même voulait régner seule en impératrice et lui refusait ce titre". Elle jalouse également le père de sa belle-fille, qui a peut-être élevé au rang de César. La crise éclate en 227. Julia Mamaea jette Orbiana hors du palais impérial et l'insulte si violemmement que son père l'emmène se réfugier dans le camp des prétoriens. Cela équivaut à une véritable rébellion. Julia Mamaea ordonne l'exécution du père et exile la fille en Afrique du Nord. Trop faible, le jeune Sévère Alexandre n'a pas le courage de s'opposer à la destruction de son mariage. CursusSévère Alexandre est adopté et déclaré César par Elagabale, le 10 juillet (?) 221. Il s'attire le respect et l'affection du peuple et des prétoriens. Jaloux, Elagabale veut l'éliminer. Mais les serviteurs et les prétoriens favorables à son cousin réussissent à déjouer ces noirs desseins. Dies imperii : 13 mars 222.RègneA la mort d'Elagabale, le 13 mars 222, les prétoriens acclament son cousin Sévère Alexandre empereur, César depuis l'année précédente. Le sénat ratifie immédiatement ce choix pour déjouer les manoeuvres de certaines factions de l'armée et lui confère tous les titres et tous les pouvoirs de la dignité impériale. Le nouveau règne apporte l'espoir d'un gouvernement plus ordonné et, de fait, les historiens anciens considèrent Sévère Alexandre comme un empereur modèle. Ils ne peuvent cependant passer sous silence le fait que l'empereur ne maîtrise pas totalement les événements. Comme il n'a que dix-sept ans, le règne s'ouvre par la corégence de Julia Mamaea, sa mère et la grand-mère de l'empereur, la terrible Julia Maesa. Le pouvoir repose en réalité sur les épaules de sa mère Julia Mamaea, qui gouverne l'empire avec ses conseillers. Mais elle ne contrôle pas l'armée, et le règne est perturbé par l'agitation et l'indiscipline des soldats. Malgré ses prétentions, Julia Mamaea dirige avec modération, à la satisfaction générale, sans tomber dans les pièges du règne précédent. Elle choisit seize sénateurs, éminents et respectés, comme conseillers de l'empereur. Les excès religieux d'Elagabale sont oubliés, les anciens dieux restaurés dans leurs sanctuaires. La pierre noire retourne en Syrie, tandis que l'Elagabalium, sur le Palatin, est transformé en temple de Jupiter Ultor. Julia Mamaea, qui surveille la vie privée de son fils, s'emploie à prévenir les déréglements du genre de ceux d'Elagabale. La mort de Julia Maesa, en 224, laisse Julia Mamaea libre de conforter son autorité. Ses pouvoirs toujours plus étendus provoquent le ressentiment d'Alexandre. Ainsi, "il s'indignait qu'elle montrât de l'avidité et manifestât un si vif intérêt pour l'argent."De même, il ne peut retenir "son indignation à la voir s'approprier sous la menace les biens et l'héritage d'autrui". En 227, Julia Mamaea est nommée Mater Augusti et castrorum et senatus et patriae ("mère de l'empereur, de l'armée, du sénat et de la patrie"). Plus tard, elle adopte le titre plus grandiloquent de mater universi generis humani ("mère de tout le genre humain"). Dans les premiers mois du règne, Julia Mamaea a pour bras droit Domitius Ulpianus (Ulpien), avocat et écrivain remarquable. Ulpien est nommé commandant de la garde prétorienne, avec des pouvoirs importants. Il introduit avec succès un certain nombre de réformes, mais ne parvient pas à contrôler les prétoriens. Ainsi, des affrontements entre les prétoriens et la population de Rome font, durant trois jours, de nombreux morts des deux côtés. La chute d'Ulpien intervient en 223 ou au début de 224, lorsque, celui-ci ayant fait exécuter Julius Flavianus et Geminius Chrestus, également commandants des prétoriens, ces derniers l'assassinent dans le palais impérial. Cette rébellion n'est pas la seule. Tout au long du règne de Sévère Alexandre, une série de révoltes éclatent, témoignant de l'incapâcité du jeune souverain à rétablir l'ordre et la discipline dans l'armée. En 229, Sévère Alexandre recommande à l'historien Dion Cassius de séjourner hors de Rome pendant son consulat, faute de pouvoir garantir sa sécurité. L'indiscipline et l'insubordination règnent en maîtres non seulement chez les prétoriens, mais aussi chez les légions, cantonnées aux frontières de l'empire. Mais à son actif, il faut tout de même noter la mise en place de toute une législation en faveur des plus démunis, une remise en vigueur des institutions chargées de l'aide alimentaire, un contrôle plus sérieux des dépenses publiques, une tolérance quasi officielle de la religion chrétienne. La guerre persiqueSon incapacité militaire va le perdre. A ce mécontentement s'ajoutent bientôt de sérieux troubles en Orient. Pendant trois cents ans, les Parthes ont fait figure d'ennemi principal des Romains au Proche-Orient. Depuis le IIe siècle, l'empire Parthe décline, et Rome a saccagé pas moins de trois fois sa capitale Ctésiphon. Septime Sévère a même réussi à créer la nouvelle province de Mésopotamie en territoire Parthe. Tout change au début du IIIe siècle, avec la résurgence de la puissance perse. Le roi perse Ardachir a commencé son règne comme sujet des Parthes. Mais en avril 224, il bat son maître, le roi Parthe Artaban, et, en 226, devient le souverain officiel du nouvel empire perse. Son nom, Ardachir ou Artaxerxès, est une réminiscence du glorieux passé Perse, du temps où l'empire s'étendait de la Méditerranée à l'Indus. A la fin de l'année 231, Sévère Alexandre se trouve en Orient, à Antioche, pour combattre les Perses. Ceux-ci ont ainsi remplacé les Parthes sur la scène internationale et sur les champs de bataille. A leurs yeux, leur empire ne peut se développer que par l'annexion du bassin de l'Euphrate, trait d'union entre l'économie maritime qui prévaut dans l'océan indien et l'économie continentale qui prévaut dans les plaines de l'Eurasie. Après avoir consolidé sa position dans son royaume, Ardachir s'intéresse aux conquêtes romaines du Nord de la Mésopotamie. En 230, ses troupes envahisssent la province de Mésopotamie et s'emparent des importantes cités de Nisibe et Carrhes. Bien que très attentifs aux récents événements d'Orient, les romains semblent être pris au dépourvu par la conquête de la Mésopotamie. Sévère Alexandre, qui n'a aucune expérience militaire, prépare, non sans réticence, une expédition en Orient. L'empereur quitte Rome au printemps 231. Au passage, il s'adjoint des troupes cantonnées sur la frontière du Danube et arrive à Antioche à la fin de l'été. Mais ses plans sont bouleversés par l'agitation des soldats. Avant même le début de l'expédition, la Deuxième Légion "Traiana" d'Egypte se mutine pour imposer un nouvel empereur à la place de Sévère Alexandre. De plus, un autre usurpateur, à moins que ce ne soit le même, prend peur et se noie dans l'Euphrate. La révolte est réprimée, mais cela augure mal de l'avenir. L'assaut contre les Perses est lancé en 232. Sévère Alexandre dirige l'armée principale vers Palmyre et Hatra, tandis que les colonnes latérales progressent les unes vers le Nord, à travers l'Arménie, en direction du Nord de l'Iran, les autres vers le Sud, le long de l'Euphrate, en direction du golfe Persique. La manoeuvre n'obtient qu'un succès limité. La colonne du Nord est victorieuse. En revanche, pour des raisons inconnues, les troupes de Sévère Alexandre, au centre du dispositif, ne font guère d'effort pour s'enfoncer en territoire ennemi et laissent la colonne Sud à la merci du principal corps d'armée Perse. Lorsque Sévère Alexandre se retire à Antioche à la fin de l'été, les deux adversaires ont essuyé de lourdes pertes. Le moral a aussi souffert et les romains ne peuvent se glorifier d'aucun succès d'importance. On accuse même Sévère Alexandre de lâcheté, pour ne pas mener la guerre de façon plus résolue. Cependant, les Perses ne s'aventureront plus en territoire romain durant le reste du règne de Sévère Alexandre. La guerre en GermanieDe retour à Rome, où il célèbre un triomphe pour sa "victoire" sur les Perses, Sévère Alexandre apprend que des troubles ont éclaté à l'Ouest de l'empire. Les Germains ont percé la frontière du Rhin en plusieurs endroits. Ils ont détruit des fortins, envahi les campagnes. Sévère Alexandre prépare une nouvelle guerre. Pour faire face à cette menace, il fait appel aux troupes d'Orient. En 234, l'empereur concentre ses troupes le long de la frontière du Rhin. L'armée traverse le fleuve vers la Germanie sur un pont de bateaux. Pour gagner du temps, il tente d'acheter les Germains par des promesses d'argent. Cette politique, sage sans doute, rencontre l'hostilité des légions, toujours plus méfiantes envers le comportement peu guerrier de leur empereur. Ils sont tout aussi irrités des efforts déployés par Sévère Alexandre pour réduire les dépenses militaires, soldes et primes comprises. Cet ensemble de cironstances les pousse à se donner un nouveau chef, Caius Julius Verus Maximinus, un soldat thrace qui a gravi les échelons de la carrière militaire. En 235, Maximin se trouve dans un camp près de Mayence où, suivant les ordres de Sévère Alexandre, il s'occupe des nouvelles recrues. Hérodien fait un récit dramatique des événements qui suivent. Un matin, les soldats se réunissent pour l'entrainement sur le terrain d'exercice habituel; aussitôt que Maximin apparaît, ils posent sur ses épaules le manteau de pourpre et le proclament empereur. Maximin feint d'être surpris et accepte l'honneur avec réticence. En fait, la scène a été soigneusement mise au point. Les rebelles se retournent rapidement contre Sévère Alexandre, qui réside dans le camp voisin du Vicus Britannicus (actuellement Bretzenheim). Informé de ce qui se trame avant l'arrivée des rebelles, Sévère Alexandre va manquer de sagesse et de courage. "Il bondit hors de la tente impériale comme en délire, avec des larmes et des tremblements; il accusait Maximin de déloyauté et d'ingratitude, rappelait tous les bienfaits que ce dernier avait reçus de lui". Ses soldats lui promettent fidélité, mais le lendemain, à l'aube, à la vue du nuage qui annonce l'arrivée des troupes de Maximin, ils changent d'avis et passent aux rebelles. La fin est rapide. "Alexandre, tremblant et presque déjà mort, s'en revint avec peine dans sa tente. Il s'y jeta dans les bras de sa mère et l'accusa, dit-on, avec force lamentations, d'être la cause de ses malheurs : c'est ainsi qu'il attendit son meurtrier ! De son côté, proclamé Auguste par la totalité de l'armée, Maximin envoyait un tribun et des centurions avec l'ordre de tuer Alexandre, sa mère et tous ceux de son entourage qui leur resteraient. Parvenus à la tente d'Alexandre, les soldats s'y précipitent, tuent l'empereur, sa mère et tous les personnages qui paraissent avoir son amitié et son estime." (Hérodien, VI, 9, 6-7) Si l'Histoire Auguste dit vrai, le corps de Sévère Alexandre est ramené à Rome et enterré dans une très belle tombe. En Gaule, on érigera un cénotaphe à sa mémoire, mais après la disparition de Maximin, qui a condamné officiellement son prédécesseur et effacé son nom des inscriptions. Trois ans plus tard, en 238, Sévère Alexandre est divinisé par le sénat. Un collège de prêtres, les sodales Alexandini, sont voués à son culte. Sévère Alexandre a régné treize ans, trois fois plus longtemps que le pittoresque Elagabale. Pourtant, il demeure fantomatique et mystérieux. Hérodien, la principale source du règne, émet sur lui un double avis. D'une part, il dit que, avec son avènement, Rome est passée de la Tyrannie arbitraire d'Elagabale à un gouvernement de type aristocratique, approuvé à la fois par le peuple et par le sénat. Il loue particulièrement les années qui précèdent la guerre persique, au cours desquelles Sévère Alexandre a gouverné sans donner matière à la moindre critique. L'Histoire Auguste va plus loin en le décrivant comme "le meilleur des empereurs". D'autre part, Hérodien, comme d'autres sources, affirme que Sévère Alexandre était faible et qu'il restait trop dans le giron de sa mère. En outre, il était incompétent sur le plan militaire et n'a pas su se montrer généreux avec l'armée. C'est ce qui a finalement scellé son destin. |
