Constantin Ier : naissance le 27 février 272 à Naissus (Mésie); mort le 22 mai 337 à Nicomédie (Bithynie)Titre : Imperator Caesar Flavius Constantinus Pius Felix Invictus Augustus (310-22 mai 337 : 27 ans)Nom 
			Flavius Valerius Constantinus. Son prénom est incertain. Les inscriptions et les monnaies le nomment tantôt Lucius, tantôt Marcus, voire Caius. NaissanceUn 27 février autour de l'an 280. FamilleElle est originaire de Naissus (Nisch). PèreL'empereur Constance Chlore. MèreConstantin a pour mère Flavia Julia Helena. Est-elle servante dans une auberge de Depranum (Yalova) en Bithynie ou fille d'un roi barbare lorsque Constance Chlore l'épouse ? Les sources ne sont pas claires à ce propos. En 293, Constance Chlore doit la répudier lorsque Maximien le choisit comme César. Elle mène, dès cette difficile séparation, la vie d'une veuve chrétienne. Elle meurt, en 327, à Nicomédie (?), auprès de son fils, à son retour de son célèbre pélerinage à Jérusalem. PortraitGrand, large d'épaules, le cou épais, le teint coloré, le visage rasé, les cheveux courts, le menton rond, le nez aquilin, les joues pleines..., Constantin produit sur tous ceux qui l'approchent la même impression. C'est un homme beau et fort. Il fait montre de ses qualités militaires dans ses campagnes contre les Sarmates et les Germains, et de ses qualités politiques dans ses relations avec les divers Augustes qui lui disputent le gouvernement de l'empire. Epris de justice et de vérité, sa conversion au christianisme à partir de 312 n'est pas seulement un calcul politique, elle est aussi une démarche authentiquement religieuse. Mais ce côté admirable ne peut voiler une face moins reluisante du personnage. Il est tenaillé par un orgueil et un appétit de louanges démesurés, d'autant plus nuisibles à sa renommée qu'il se laisse influencer par son entourage. Incapable de se dominer, il est prêt à toutes les violences, à tous les crimes. Ce combat perpétuel que se livrent en lui aspirations mystiques et violences impulsives, rendent sa vie singulièrement dramatique. MariageConstantin épouse d'abord Minervina qui lui donne, en 303, un fils Flavius Julius Crispus. Il la répudie, en 307, pour raison d'Etat. Afin de sceller son alliance avec l'empereur Maximien, il épouse, le 25 décembre 307, sa fille Fausta qui lui donne trois fils et deux filles (?). CursusConstantin est élevé à Nicomédie, à la cour de Dioclétien. Celui-ci l'a-t-il pris auprès de lui pour le préparer à succéder à son père ou pour s'assurer de la fidélité de ce dernier ? La question reste ouverte. En même temps qu'il reçoit une éducation princière, il entame une carrière militaire. Lorsqu'en 305, Dioclétien abdique et passe le témoin à Galère, Constantin reste ou est retenu auprès du nouvel empereur. Il n'en fait pas mystère, il est très déçu de ne pas avoir été nommé le César de son père. Celui-ci est aussi fort mécontent de ne pas avoir auprès de lui son fils comme premier collaborateur, forcé qu'il est d'accepter Sévère, une créature de Galère, comme César. En 306, cependant, Galère accepte, non sans de grandes réticences, de laisser Constantin rejoindre son père qui le réclame avec insistance. Père et fils se retrouvent à Boulogne (on raconte que Constantin fait mutiler tous les chevaux de poste qu'il laisse derrière lui pour empêcher les soldats de Galère de le rattraper et de le ramener à la cour impériale, l'empereur étant revenu sur son acceptation de le laisser rejoindre Constance Chlore), et ensemble s'en vont combattre en Bretagne les Pictes qui viennent de se soulever. Le 25 juillet 306, Constance Chlore meurt à Eburacum (York). Immédiatement, ses soldats proclament son fils Auguste. Galère, bien entendu, refuse de reconnaître Constantin. Il élève à la dignité d'Auguste son ami Sévère, et ne concède à Constantin que celle de César. Celui-ci sent que son heure n'a pas encore sonné. Il décline donc le choix des soldats de son père et accepte la proposition de Galère. Dies imperii : 25 juillet 306Quand bien même Constantin se contente du titre et de la fonction de César, les historiens romains calculent ses années de règne à partir de la mort de son père. RègneLe règne de Constantin, comme celui de Dioclétien, marque un tournant dans l'histoire de l'empire. C'est à Constantin qu'il revient d'avoir fait du christiannisme la religion officielle de Rome. Il est également le fondateur de la nouvelle capitale impériale, Constantinople. Après le système de la tétrachie, le souverain revient à une conception du pouvoir unique. Il est assez difficile de cerner la véritable personnalité de Constantin, qui disparaît derrière les panégyriques d'Eusèbe et d'autres chrétiens. On ne saurait, certes, douter de la sincérité de ses convictions religieuses, mais Constantin est un habile propagandiste, un chef militaire doué, un manipulateur déterminé et sans scrupules. Dans les faits, Constantin, qui contrôle la Gaule et la Bretagne, se fait proclamer Auguste par ses soldats, le 21 mars 307, à la suite de la capture de Sévère II. Craignant de voir Constantin passer dans le camp de Galère et se dresser contre son fils, Maximien se rend en Gaule et fait alliance avec lui, le 25 décembre 307. En novembre 308, lors de leur entrevue à Carnutum, Dioclétien, Maximien et Galère le remplacent par Licinius, une nouvelle créature de Galère. Constantin refuse cette nomination. En 309-310, il rompt avec la domus divina de son père, la domus herculienne, manifestant ainsi son divorce avec le système mis en place par Dioclétien. En se plaçant sous la protection d'un autre dieu, Apollon, Sol Invictus, il indique clairement sa volonté de créer un autre système de gouvernement où il n'y a de place, au sommet de la pyramide, que pour un seul homme, lui-même, image sur terre du Soleil le Victorieux. Durant le premier semestre de cette même année 310, il agrandit son domaine en s'emparant de l'Espagne. Galère, qui n'est pas assez puissant pour le contrer et installer Licinius à la tête de l'Occident, accepte le fait accompli. Il lui reconnaît sa dignité d'Auguste. En 311, Galère meurt. Licinius, qui ne règne que sur la péninsule balkanique, tente alors sa chance pour ravir la direction de l'Orient à Maximin Daia, lequel s'est fait proclamer Auguste, en 307, par ses soldats. En Occident, Constantin n'a donc plus qu'un seul rival : Maxence qui règne sur l'Italie et l'Afrique. En 312, Constantin, après avoir assuré la défense du Rhin contre les Germains, et s'être acquis la neutralité de Licinius, décide d'en finir avec Maxence. Il n'emmène avec lui qu'une petite armée de trente à quarante mille hommes, laissant le gros de ses troupes sur le Rhin. Mais ses soldats sont tous des hommes aguerris, solides. Vers la fin du printemps ou le début de l'été 312, il lance une attaque foudroyante par le col du Mont Genèvre qui surprend complètement les garnisons de Maxence chargées de défendre les passages des Alpes. Puis, après avoir pris pied en Italie, il engage un premier combat devant Turin avec l'armée de son rival, une armée de plus de cent mille hommes. Les autres cités de l'Italie du Nord n'hésitent plus. Les unes après les autres, elles lui ouvrent leurs portes. Dans un deuxième combat près de Brescia, il met en fuite la cavalerie de Maxence, puis il fait le siège de Vérone qui capitule. Aquilée et Modène suivent. La route de Rome est désormais libre, Maxence n'ayant pas jugé bon de défendre les défilés des Apennins. La bataille décisive a lieu le 28 octobre 312, dans les environs de Rome, près du pont Milvius qui enjambe le Tibre. Au premier choc, l'armée de Maxence cède, seuls ses prétoriens tiennent bons. Mais ils se font massacrer. C'est alors que Constantin, à la tête de sa cavalerie, fait sonner la charge finale. L'armée de Maxence est bousculée dans le Tibre où une grande partie se noie. Ce n'est que le lendemain que l'on retrouve le corps de Maxence. Constantin ordonne de trancher sa tête et la fait exposer à Rome où il entre triomphalement le 29 octobre. C'est lors de cette campagne victorieuse que se déroule un événement lourd de conséquence pour l'Histoire. Constantin se convertit au christiannisme. Adorateur d'Hercule, puis d'Apollon, Sol invictus, qui, à la fin de 309 ou au début de 310, dans une "vision", lui promet un règne de trente ans, il se tourne, en 312, vers le dieu des chrétiens, qui, dans une nouvelle "vision", à la veille de son combat contre Maxence, au pont Milvius, lui promet la victoire. C'est durant la nuit qui précède cette bataille que Constantin a cette célèbre vision, ce rêve, comme le pensent la plupart des chercheurs actuels, au cours duquel il "fut averti... de faire marquer les boucliers du signe céleste... un X traversé de la lettre I infléchie vers son sommet" (Lactance, De la mort des persécuteurs, ILIV). En demandant à ses soldats de graver ce signe sur leurs boucliers, Constantin, superstitieux comme il est, veut peut-être utiliser à son profit, en lui promettant, s'il passe dans son camp et lui accorde la victoire, de passer dans son camp à lui. Cette victoire lui vaut d'être reconnu par tout l'Occident comme le seul empereur. En 313, le sénat lui décerne le titre suprême de Primus Augustus. Constantin et LiciniusLicinius cherche alors la neutralité de Constantin dans sa lutte contre Maximin Daia pour la prise de pouvoir en Orient. Il s'empresse donc de le rejoindre à Milan. Constantin lui offre son soutien et scelle leur alliance en lui accordant la main de sa soeur Constantia. En février-mars 313, tous deux arrêtent les mesures visant au rétablissement de la paix religieuse dans l'empire. La liberté de conscience est accordée à tous. Chacun est libre de pratiquer la religion de son choix. Tous les biens confisqués aux chrétiens leur sont restitués. La mort de Maximin Daia à Tarse, durant l'été 313 (en août 313), laisse le contrôle de l'empire romain à deux hommes : Constantin, maître des provinces occidentales (Italie et Afrique du Nord comprises), et, Licinius, qui étend son autorité sur les Balkans et l'Orient. Le premier estime que le temps est arrivé de se retourner contre le second. Celui-ci fait exactement le même constat. Il leur faut huit ans (316-324) et deux guerres pour forcer la décision. Licinius a accédé au pouvoir en 308, à la conférence de Carnuntum, comme candidat de Galère. C'était effectivement un viel ami de Galère, dont il avait partagé la tente en campagne. Un peu plus âgé que Constantin (il est né vers 265, Constantin en 272 ou 273), Licinius a été nommé Auguste en Occident à la place du malheureux Sévère, derrière le dos de Constantin. Son incapacité à déloger Maxence d'Italie prouve que le centre de son pouvoir est resté dans les Balkans. Les années de coopération entre Constantin et Licinius voient s'établir une trêve incertaine et non des relations de franche amitié. En 313, les deux hommes scellent leur alliance politique par le mariage de Licinius avec Constantia, la demi-soeur de Constantin. Deux facteurs vont s'opposer à la réussitte d'un partage du pouvoir. Le premier, c'est qu'en 313 Constantin a déjà décidé d'intégrer le christiannisme à sa politique; Licinius accepte cette idée, mais n'a jamais été, semble-t-il, un fervent partisan de cette religion. Le deuxième est plus déterminant : Constantin n'est décidé à tolérer l'existence d'un rival que tant qu'il ne peut procéder autrement. La rupture intervient en 316, Constantin en est le seul responsable malgré la tentative des historiens chrétiens d'en rejeter la faute sur Licinius. En juillet ou août 315, Licinius et Constantia (la demi soeur de Constantin) ont un fils, Licinius le Jeune, promis à la dignité de César le moment venu. Mais Constantin propose à Licinius de nommer comme César, avec le contrôle de l'Italie, son beau-frère Bassianus, le mari de sa demi-soeur Anastasia et de lui donner une terre à gouverner, sorte d'Etat-tampon dans la péninsule balkanique entre l'Orient et l'Occident. Mais comme celui-ci tarde à l'élever à cette dignité, Bassianus complote contre son beau-frère, avec la bénédiction de Licinius. Lorsque Constantin apprend ce qui se trame, il fait exécuter Bassanius. Au début, les opérations se déroulent bien pour Constantin. Le 8 octobre, à la bataille de Cibalae, (près de Sirmium en Pannonie) il inflige une sévère défaite à l'armée de Licinius, bien plus forte que la sienne. Licinius s'enfuit vers l'Est et gagne Serdique où il proclame Valens, le commandant des forces frontalières du Danube, coempereur avec le titre d'Imperator Caesar Aurelius Valerius Valens Pius Felix Augustus. Valens rassemble une nouvelle armée. Une seconde bataille est livrée près d'Andrinople en Thrace, en un lieu appelé Campus Adriensis (en Thrace). Cette fois, l'isue du combat est moins claire. Aussi, Constantin est-il contraint de négocier. Valens est exécuté, tandis que Licinius est amené à céder la majeure partie des provinces des Balkans à Constantin. Le traité est confirmé officiellement à Serdique, le 1er mars 317, et scellé par des dispositions dynastiques. Les fils de Constantin, Crispus et Constantin II, sont promus au rang de César, de même que Licinius le Jeune. Mais aucun des trois garçons n'est assez âgé pour participer effectivement au pouvoir. Crispus est un adolescent et les deux autres ne sont encore que des enfants. Mais cet accord n'est qu'un armistice. Armistice qui dure de 317 à 324, les deux empereurs ayant chacun de leurs côtés des problèmes qui leur donnent du fil à retordre. Durant ces années de trêve, Constantin doit, en effet, mener une activité militaire importante aux frontières pour contenir les barbares. En 320, son fils aîné Crispus inflige aux Francs une défaite sur la rive droite du Rhin. Lui-même, en 322, bat les Sarmates à Campona, et refoule, la même année ou en 324, les Goths du roi Rausimod qui, une fois de plus, ont traversé le Danube. C'est dès cette époque que l'emblème chrétien du monogramme constantinien apparaît sur les monnaies. Durant ces années-là également, Constantin mêne encore une activité législative très importante. Il révise, dans le sens des idées chrétiennes, les anciennes règles juridiques. En 321, il accorde à l'Eglise le droit de recevoir des héritages. Cette loi est à l'origine des richesses de l'église. Très rapidement ces richesses vont atteindre des proportions gigantesques et donner à l'Eglise une puissance économique extraordinaire, au point d'inquiéter Constantin lui-même. Mais cette puissance va permettre à l'Eglise de prendre en charge tout le secteur social et hospitalier dévolu jusqu'alors à l'Etat. Les questions religieuses et plus particulièrement celles posées par les ariens et les donateurs occupent aussi le neo-chrétien Constantin, durant ces années-là. N'étant pas un théologien, et encore moins un dogmatique, il hésite à tailler dans le vif. Il ne tient pas à déclencher une tempête religieuse à l'intérieur de ses terres au moment où Licinius profite de cet armistice pour se préparer à l'affrontement final. Durant les six années suivantes, Licinius se montre tolérant envers les chrétiens, ce qui ne l'empêche pas de conserver des liens étroits avec des écrivains et philosophes païens. Au même moment, Constantin se présente partout comme le champion des chrétiens. Ce qui conduit Licinius à soupçonner les chrétiens de son entourage d'être des espions à la solde de Constantin. Il commet l'erreur de sévir contre eux, fournissant ainsi à Constantin le prétexte qu'il attend pour déclencher une nouvelle et dernière guerre. Licinius n'est pas un persécuteur comme Galère et Maxime Daia, mais il renvoie les chrétiens de l'administration et de l'armée. A l'occasion, il trouve des raisons d'accuser certains évêques de délouyauté, les exécute et détruit leurs églises. En 324, Constantin décide d'en finir avec son rival. Il réunit cent trente mille hommes, en Thrace, tandis que Licinius en rassemble cent soixante-cinq mille. La rencontre a lieu le 3 juillet 324, sur les bords de l'Hèbre, devant Andrinople. La victoire sourit à Constantin. Licinius s'enfuit sur l'autre rive du Bosphore, à Byzance et nomme un autre coempereur pour l'aider. Il s'agit du commandant de sa garde, Martius Martinianus, qui prend le titre d'Imperator Caesar Martius Martinianus Pius Felix Augustus. Constantin l'assiège. Crispus réussit à détruire, après une bataille navale de deux jours, les trois cent cinquante galères de Licinius qui cherchent à ravitailler la ville. Il ne reste à Licinius qu'à fuir de nouveau. Il gagne la côte d'Asie où, le 18 septembre 324, à Chrysopolis, il perd de nouveau une bataille. Il se réfugie alors dans sa capitale Nicomédie où il est forcé finalement de capituler dans les derniers jours de septembre. Le 8 novembre, Constantin élève son troisième fils Constance à la dignité de César. Quelques jours plus tard, Licinius et Martinianus se rendent à Nicomédie, contre la promesse que leurs vies seraient épargnées. Constantin envoie Licinius à Thessalonique pour y vivre comme un citoyen ordinaire. Mais peu de temps après, Constantin rompt son serment, comme à son habitude, et le fait pendre au printemps 325. Son fils Licinius, âgé de neuf ans, meurt avec lui. La même année, Martinianus connaît un sort similaire en Cappadoce. Constantin et le christianismeLe système érigé par Dioclétien a vécu. L'unité de l'empire est de nouveau réalisée autour d'un seul empereur et d'une seule dynastie et sous une seule bannière, celle de la Croix. Ayant réalisé l'unité politique de son empire, il peut dès lors se consacrer plus librement à son unité religieuse. La défaite de Licinius permet à Constantin de promouvoir plus librement sa politique religieuse. Peu après 324, les sacrifices païens sont interdits. Des agents impériaux écument les provinces orientales à la recherche des trésors des temples païens qu'ils saisissent aussitôt. Une partie du butin de cette gigantesque confiscation servira à construire des églises, notamment sur les lieux saints de Jérusalem et Bethléem. Dans le même temps, on interdit les combats de gladiateurs, et Constantin édicte des lois sévères contre l'immoralité sexuelle et interdit la prostitution rituelle. D'après l'historien Zosime, Constantin rongé par le remords après la mort de Crispus et de Fausta, se serait tourné vers le christianisme à la recherche du pardon. En réalité, l'empereur a adopté la nouvelle foi avant, en 312, juste avant la victoire du pont Milvius, après avoir vu une croix dans le ciel. Il n'a pas supprimé tout de suite le culte des anciens dieux. Les images du culte solaire figurent sur ses monnaies jusqu'en 320. Comme Aurélien et les autres empereurs soldats qui l'ont précédé, Constantin a certainement été un adorateur du Soleil, divinité suprême, jusqu'en 312. L'idée d'une divinité suprême, au caractère un peu flou, se profilant derrière la religion traditionnelle n'est pas très éloignée de la notion chrétienne d'un dieu unique et tout puissant. Lorsque Constantin a été touché par la foi, la transition vers le christiannisme s'est opérée aisément. Chrétien convaincu dès 312, Constantin impose avec prudence la nouvelle religion officielle à l'empire. En 313, Licinius et lui-même étendent la restitution des biens de l'Eglise aux chrétiens des provinces orientales, mais ils ne cherchent en rien à limiter ou interdire le culte des dieux traditionnels. Une fois engagé dans le christiannisme, Constantin intervient dans les débats théologiques tels que le schisme donatiste qui divise l'Eglise d'Afrique. En 314, il convoque les évêques d'Occident à Arles pour tenir un concile chargé de régler la question. Constantin, qui assiste au concile en tant que laïc, s'emploie à faire appliquer ses décisions en ordonnant la confiscation des églises donatistes. La mesure sera abrogée en 321, mais jusque-là, Constantin va prouver qu'il peut persécuter lui aussi les chrétiens qui ne sont pas dans le droit chemin. Si l'empereur n'exclut pas les dignitaires païens de son entourage, il est clair que, durant ses dernières années de règne, les évêques jouent un rôle prééminent à la cour. Eusèbe en vient même à comparer Constantin et ses évêques aux apôtres qui entourent le Christ au paradis ! Constantin qui n'entend rien à ces questions doctrinales, mais qui entend sauvegarder avant tout la paix et l'unité de son empire, dans lequel l'Eglise et l'Etat sont désormais liés de façon indissoluble, accepte l'idée de réunir dans un concile général tous les évêques de la chrétienté pour trancher une fois pour toutes les questions que posent ces hérésies. Si le donastisme n'affecte qu'une région, l'Afrique, l'hérésie arienne, touchant la croyance en la Trinité, s'est répandue dans tout l'empire, tout particulièrement en Orient où elle rencontre un grand succès parce que plus en affinité avec la culture philosophique grecque. "L'évêque pour le dehors", comme il aime à s'appeler, les invite donc à se réunir en Bithynie, dans la ville de Nicée, proche de Nicomédie où il séjourne alors avec sa cour. Le concile de Nicée condamne l'hérésie d'Arius et définit l'orthodoxie dans le credo chrétien. Plus de deux cents évêques siègent donc dans cette ville du 20 mai au 25 août 325, dans une salle du palais impérial, après une ouverture solennelle présidée par l'empereur en personne. Durant ces quatre mois, ces responsables de l'Eglise définissent la doctrine chrétienne. Ils fixent sa rédaction sous la forme d'un Symbole, d'un Credo, qui deviendra, après les modifications apportées par le concile de Constantinople, en 381, le Credo de l'Eglise catholique. Constantin prononce un long discours théologique, Discours à l'assemblée des saints, devant une audience rassemblée probablement à Antioche. Durant toutes ces années, il continue à porter le titre de Pontifex Maximus. Il ne franchit le dernier pas, celui du baptème, qu'en 337, sur son lit de mort. Mais cette clarification ne réalisera pas immédiatement l'unité religieuse de l'empire. Durant près d'un siècle encore, on trouvera dans cet empire des chrétiens orthodoxes, des chrétiens ariens et donatistes et des adeptes de l'ancienne religion romaine. C'est à cette époque que Constantin, reprenant une tradition helléniste, fait frapper sa célèbre monnaie qui le représente levant les yeux vers le ciel. Il entend marquer par là sa volonté de gouverner en accord avec Dieu. La nouvelle et l'ancienne capitaleLorsqu'il était souverain d'Occident, Constantin a surtout résidé à Trèves. D'importants monuments, comme les thermes impériaux et une grande basilique, témoignent des efforts de l'empereur pour faire de la ville une capitale à la mesure de ses ambitions. En 316, il transfère le centre de ses activités dans les provinces des Balkans, reprises à Licinius, et élit Serdique (l'actuelle Sofia), puis Sirmium (près de Belgrade) comme centres de son pouvoir. C'est aussi à cette époque que Constantin transforme et agrandit Byzance (le 8 novembre 324), qui désormais s'appellera Constantinople. Constantin fonde alors une nouvelle capitale sur l'emplacement de la cité déjà existante de Byzance. Le programme de construction, colossal, dépasse celui de Dioclétien à Nicomédie. Six ans après le début des travaux, la ville peut être consacrée sous le nom de Constantinople. On ne sait s'il choisit cette ville pour en faire la nouvelle capitale de l'empire ou, plus simplement, pour laisser après lui une ville qui portât son nom. Ce qui est certain, c'est que les empereurs résident de moins en moins souvent à Rome éloignée des points névralgiques de l'empire, du commerce international avec l'Asie, de la route commerciale Rhin-Danube en plein essor. Le choix de la ville de Byzance, par contre, représente un intérêt stratégique de première importance. Elle constitue une excellente base militaire pour intervenir rapidement aussi bien sur la frontière du Danube toujours menacée par les Barbares, qu'en Mésopotamie toujours convoitée par les Perses. Constantin se souvient aussi que c'est par les détroits que surveille Byzance, que les Germains ont passé, au IIIème siècle, pour mettre à feu et à sang l'Asie. De plus, cette ville est un des terminus des routes commerciales avec l'Orient et avec l'Europe du Nord et une ville-étape importante de la route du pélerinage à Jérusalem. La consécration de la ville nouvelle a lieu le 8 novembre 324 et sa dédicace le 11 mai 330. Le gouvernement de l'EmpireConstantin est un administrateur énergétique et efficace. Il établit un corps de "comites" (compagnons), lui-même divisé en trois, qui doivent obéissance à l'empereur et remplissent diverses tâches gouvernementales. Il continue à développer le cérémonial de cour établi par Dioclétien, qui présente l'empereur comme un personnage sacro-saint, éloigné du commun des mortels. Pour symboliser la position suprême de l'empereur, Constantin adopte un précieux diadème. Dans le domaine militaire, la principale innovation de Constantin réside dans la division de l'armée en ripenses (troupes frontalières) et comitatenses (armée mobile). Ces dernières troupes, qui stationnent à quelque distance de la frontière, peuvent être déployées sans affaiblir les défenses frontalières. Elles sont structurées selon des dispositions prises par les empereurs depuis Gallien. Les contemporains se sont montrés sceptiques sur l'efficacité de ces mesures; pour eux, les soldats devaient se trouver sur la frontières, où la menace est la plus forte. Mais il est indéniable que l'armée mobile a bien servi Constantin durant les guerres civiles des premières années, puis durant les campagnes des années 320 et 330. De façon générale, les sources considèrent que l'administration de Constantin n'est ni bonne ni mauvaise. Certains auteurs jugent ses lois trop sévères. D'autres le louent pour avoir mis fin aux abus fiscaux. Certes, sa popularité auprès de la minorité chrétienne lui a assuré un soutien minimum, quoiqu'il fasse. Concernant l'imposition, toutefois, les chrétiens se joignent au concert de lamentations. Constantin établit un impôt payé en or ou en argent, le chrysargyre, prélevé tous les quatre ans sur les citadins de l'empire. Zosime rapporte que "quand approchait l'échéance de la période de quatre ans où il fallait que le terme soit versé, on pouvat être témoin de pleurs et de lamentations dans toute ville et le terme une fois échu, des coups de fouet et des tortures infligés aux membres de ceux qui ne pouvaient supporter le poids d'une amende à cause de leur extrême indigence. Désormais, les mères vendirent leurs enfants et les pères installèrent leurs filles à la maison de prostitution, pressés qu'ils étaient d'accumuler, grâce au travail de celles-ci, de l'argent pour ceux qui collectaient le chrysargyre." Il est difficile de déterminer le niveau moyen d'augmentation des impôts sous Constantin. La confiscation des biens des temples païens a peut-être compensé ses pires effets. En revanche, il est sû que la charge de l'imposition s'est déplacée de la campagne vers la ville. Les problèmes familiauxLa victoire de Chrysopolis fait de Constantin le maître inconstesté du monde romain. Jusque-là; il s'est montré prudent et clément, qualifiant ses adversaires de tyrans tout en recherchant l'approbation du peuple pour ses propres actions. Après Chrysopolis, les contemporains décellent un changement : "Enfin, il n'eut plus besoin de cacher sa méchanceté naturelle mais agit conformément à son pouvoir sans limites." Ce durcissement apparaît clairement en ce qui concerne Licinius. Mais le pire reste à venir, en 326, avec la mort de son fils Crispus et de sa propre épouse. Crispus est le fils de Constantin et de sa première femme Minervina. Né vers 300, il a joué un rôle majeur dans la guerre contre Licinius. Constantin le récompense en lui cédant le gouvernement des provinces occidentales. Crispus installe sa résidence à Trèves. En 326, l'empereur quitte Constantinople pour Rome où il a convoqué toute sa famille pour y célébrer le 26 juillet ses vingt années de règne. Il semble qu'à cette occasion, il veut désigner Crispus, le fils de Minervina, sa première épouse, comme son successeur. Le père et le fils se retrouvent à Pola, en Istrie, où Crispus est exécuté pour adultère. L'une des versions de cette histoire rapporte que Fausta, la seconde épouse de Constantin, était amoureuse de son beau-fils et l'aurait dénoncé pour adultère après avoir été repoussée par celui-ci. Le mois précédent, Constantin a promulgué un édit très sévère contre l'inconduite sexuelle. Peut-être Crispus est-il tombé sous le coup de cette loi. On peut aussi soupçonner fortement Fausta d'avoir intrigué pour éliminer Crispus et ouvrir la voie du pouvoir à ses propres fils. Mais si Fausta parvient à éliminer Crispus, le retour de bâton ne se fait pas attendre. Peu de temps après, l'impératrice est surprise en flagrant délit d'adultère avec un esclave. Or, dans un édit publié en mai de cette même année 326, Constantin a ordonné que toute femme libre qui s'unissait à un esclave devait être punie de mort. Comme pour son fils, Constantin fait appliquer la loi. Mais il fait déguiser la mort de sa femme par un accident. Elle meurt ébouillantée alors qu'elle prend un bain. Est-ce pour expier ces deux condamnations à mort prononcées par son fils que Hélène, sa mère, entreprend, avant la fin de l'été (?) son pélérinage à Jérusalem ? C'est lors de son séjour qu'on découvre le bois de croix qui servit de gibet au Christ ainsi que la grotte qui lui servit de tombeau. A cette nouvelle, Constantin ordonne la construction sur le Golgotha d'une basilique qui est achevée en 335, et sa mère fait construire à Rome l'église de la Sainte-Croix. Après un séjour de quelques mois dans l'ancienne capitale de l'empire, Constantin entreprend, durant l'hiver 326-327, une tournée d'inspection sur le Danube, qu'il fortifie en plusieurs endroits. Précautions qui se révèlent fort utiles quelques années plus tard pour stopper les mouvements de peuples qui ont lieu en Europe orientale et centrale. Les Goths chassent devant eux les Vandales, au Nord de la Transylvanue, lesquels poussent les Sarmates de Hongrie qui appellent au secours les romains. Durant l'hiver 331-332, les Goths ayant même réussi à franchir le Danube à la hauteur de la Scytie Mineure, Constantin II, le fils de l'empereur, parvient à les bloquer. Plus de cent mille d'entre eux périssent de faim et de froid. Les survivants demandent grâce et obtiennent le statut de fédérés chargés de défendre la frontière. Quant aux Sarmates, Constantin en accueille trois cent mille qu'il répartit en Trace, en Macédoine, en Italie, et même en Gaule. Cette politique de fortification des frontières, d'absorption, de massacre, de déportation et de conversion au christianisme des barbares lui permet de les neutraliser efficacement pour plusieurs années. Chrétien, Constantin cherche encore et par tous les moyens à affaiblir l'ancienne religion romaine en l'éliminant de toutes les manifestations officielles, en dépouillant les temples de leurs richesses... Peu d'empereurs font l'objet de controverses aussi passionnées que Constantin. En se convertissant et en se présentant comme l'empereur de par la grâce de Dieu, il est le créateur d'un empire chrétien. En rétablissant l'unité après la tétarchie, il crée un nouvel empire, l'empire byzantin. En "fondant" Constantinople, il donne à cet empire une nouvelle capitale au détriment de Rome. Pour ces raisons, on peut dire qu'il est encore plus révolutionnaire qu'Auguste, le fondateur de l'empire romain. En 337, peu avant Pâques, Constantin se prépare pour une nouvelle guerre contre les Perses qui se sont emparés, en 334, de l'Arménie, protectorat romain. Le 3 avril, alors qu'il célèbre la fête de Pâques dans sa ville de Constantinople, il tombe malade. Une hernie l'oblige, lui qui aime à s'appeler "l'évêque pour le dehors" à entrer précipitamment dans l'Eglise. En effet, ses médecins lui conseillent d'abord de prendre des bains dans une ville d'eaux pour le guérir de sa fièvre. Toujours affaibli, il se rend à Hélénopolis prier sur le tombeau de Lucien d'Antioche, puis va se reposer dans sa villa d'Ancyro près de Nicomédie. Mais sentant la mort approcher, il demande à l'évêque Eusèbe de Nicomédie le baptême avec cette conviction fort répandue alors que le simple fait de recevoir ce sacrement effaçait tous ses péchés antérieurs et lui permettait d'entrer sans autre formalité dans le paradis. Ce baptême tardif a une autre raison, peut-être plus déterminante encore. Aux yeux de Constantin, le pouvoir impérial est toujours entâché de paganisme. Ce n'est qu'en l'abdiquant qu'il peut accomplir cet acte de foi décisif. L'empire restauréLa fondation de Constantinople marque une étape supplémentaire dans le déclin de Rome et de l'Italie et, plus généralement, dans celui des provinces occidentales. Pourtant, Constantin ne néglige pas complétement l'ancienne capitale. Il achève la basilique commencée par Maxence et édifie les derniers thermes impériaux, les thermes de Constantin. En outre, deux de ses proches parents sont enterrés à Rome, dans les mausolées construits pour eux. Il s'agit de sa mère Helène, inhumée à Tor Piganattara sur la via Praenestina (son sacophage se trouve aux musées du Vatican), et de sa fille Constantia, qui repose dans ce qui est aujourd'hui l'église de Sainte-Constance. Il n'empêche, Constantin prive Rome de son statut de capitale impériale en dissolvant la garde prétorienne. Au cours des vingt dernières années de son règne, la vielle capitale n'aura droit qu'à une brève visite impériale. L'avenir est ailleurs. Les dernières campagnesToujours avide de gloire militaire, Constantin livre une série de guerres importantes au cours des dernières années du règne. A l'automne 328, avec son fils aîné Constantin, l'empereur défait les Alamans sur le Rhin. A la fin de 332, il lance une vaste campagne contre les Goths sur le Danube, les affamant jusqu'à ce qu'ils se soumettent et reconnaissent la suzeraineté romaine. Quelques années plus tôt, Constantin a fait reconstruire le célèbre pont sur le Danube érigé par Trajan; il lui est d'une grande utilité. Deux ans plus tard, en 334, il s'attaque aux Sarmates. En 336, il peut revendiquer la reconquête de la majeure partie des territoires daces dont s'était emparé Trajan. Le fait qu'ils aient été perdus après sa mort ne retire rien à l'exploit militaire de Constantin. Dès lors, Constantin est un homme âgé de soixante-trois ou soixante-quatre ans qui se doit de préparer l'avenir. Il fonde ses plans de succession sur les trois fils encore vivants qu'il a eus avec Fausta et sur le fils de son demi-frère Flavius Dalmatius. En 336, il divise l'empire entre eux quatre : Constantin (II) reçoit l'Occident, Constance l'Orient; Constant l'Italie et le Danube supérieur; le quatrième César, Flavius Dalmatius le Jeune, désigné le 18 septembre 335, se charge de la Grèce et du Danube inférieur. Constantin attend visiblement de ses héritiers qu'ils gouvernent l'empire sous la forme d'une tétrarchie, système que lui-même a rejeté. Ce dispositif, très imprudent, ne va guère tenir longtemps. Le baptème et la mortLa dernière grande campagne de Constantin devait être la conquête de la Perse qu'il voulait christianiser. L"empereur souhaitait aussi se faire baptiser en route, dans le Jourdain, comme Jésus. Avant de se lancer dans cette entreprise ambitieuse, il nomme son neveu Hannibalianus "roi d'Arménie et des régions voisines". De manière plus significative encore, Hannibalianus est appelé "rois des rois", le titre porté par le souverain perse qu'il est destiné à remplacer. Ce grand projet ne verra pas le jour car, après Pâques 337, Constantin tombe gravement malade. Sachant que sa mort approche, l'empereur se fait baptiser par Eusèbe, l'évêque de Nicomédie (et non l'historien) dans la villa impériale d'Ancyro. Constantin meurt le dimanche de Pentecôte (22 mai) 337. Son corps est transporté sous escorte à l'église des Saint-Apôtres à Constantinople, qu'il a fait construire pour lui servir de mausolée. L'église abrite douze faux sarcophages, un pour chaque apôtre. Le sarcophage de Constantin, le treizième, est placé au centre de l'édifice. Cette disposition évoque plus la prétention impériale à la divinité, dans l'ancienne tradition romaine, que l'humble sépulture d'un homme récemment converti au christiannisme. Quand les Romains apprennent que Constantin a décidé de se faire enterrer dans sa nouvelle capitale et non dans leur ville, ils se sentent outragés. Cela n'empêche pas le sénat de diviniser officiellement l'empereur défunt, acte religieux tout à fait incongru. Le premier empereur chrétien rejoint ainsi ses prédécesseurs païens. Les changements liés à son règne ont pourtant été fondamentaux, et la mort de Constantin marque un réel tournant dans l'histore de l'empire. La ville de Rome a définitevement perdu sa prééminence, les anciens dieux ont disparu, les valeurs civiques et la vie politique ne sont plus les mêmes. Il y a une nouvelle armée, une nouvelle administration, de nouveaux objectifs et de nouvelles stratégies; les styles et les modes dans l'art et la littérature attestent, eux aussi, une nouvelle époque. L'Etat théocratique et autocratique légué par Constantin est, certes, toujours l'Empire romain, mais il n'a plus grand-chose à voir avec l'ordre imérial établi par Auguste trois cent cinquante ans auparavant.  | 
	
