Antonin le Pieux : né le 19 septembre 86 à Lanuvium, Italie, mort le 7 mars 161 à Lorium, ItalieTitre : Imperator Titus Aelius Caesar Hadrianus Antoninus Augustus Pius (11 juillet 138 - 7 mars 161 : 22 ans, 7 mois et 24 jours)Nom 
			Glyptothek, Munnich Titus Aurelius Fulvus Boionius Arrius Antoninus, surnommé le Pieux par ses contemporains, est considéré comme l'incarnation de la vertu et du respect pour la mémoire de ses ancêtres. NaissanceTitus Aurelius Fulvus Boionus Arrius Antoninus, futur Antonin le Pieux, est né le 19 septembre 86 à Lanuvium, à environ trente kilomètres au Sud de Rome. FamilleLes ancêtres d'Antonin, originaires de Nîmes (Nemausus), ville dotée du Jus Latii sous Tibère, appartenaient à la bourgeoisie rurale. Ce statut conférait la citoyenneté romaine aux habitants de Nîmes ayant exercé une charge municipale. Pour accéder au Sénat, la famille acquiert des terres en Italie, condition indispensable pour les provinciaux, ainsi que des propriétés près de Rome. Ainsi, Antonin devient l'un des sénateurs les plus riches au milieu du IIe siècle. Devenu empereur, il reste attaché à sa ville natale, favorisant Nîmes, reconstruisant Narbonne après un incendie et développant le réseau routier de la Narbonnaise. Son grand-père paternel fut préfet de la Ville, tandis que son aïeul maternel, Arr. Antoninus, et son père, Titus Aurelius Fulvus, furent consuls, respectivement deux fois et une fois en 89. Cinq consulats marquèrent l'histoire de sa famille, son père étant réputé pour son intégrité et sa moralité. Antonin passe son enfance à Lorium, dans un domaine familial situé en Etrurie du Sud, à quinze kilomètres à l'Ouest de Rome, un lieu auquel il restera profondément attaché et où il bâtira plus tard sa résidence impériale. Orphelin de père très jeune, il est d'abord élevé par son grand-père paternel, puis par son grand-père maternel. Les héritages de ces deux lignées le propulsent parmi les hommes les plus fortunés de Rome. PèreAurelius Fulvus décède prématurément, laissant l'éducation de son fils à ses deux grands-pères. MèreArria Fadilla. CursusL'ascension d'Antonin demeure obscure en raison du manque de sources. Il suit le parcours classique d'un sénateur de haut rang : questeur, puis prêteur, il devient consul en 120, au début du règne d'Hadrien. Plus tard, il est proconsul d'Asie (128 ou 129), juge dans l'une des quatre provinces italiennes en tant que consulaire, et membre du conseil impérial, des rôles qui témoignent de l'intérêt précoce d'Hadrien pour lui. Toutefois, son expérience administrative reste limitée et ses compétences militaires inexistantes. Son séjour en Asie est son unique déplacement connu hors d'Italie, avant et après son accession à l'empire. Hadrien l'adopte et le désigne César le 25 février 138, après lui avoir imposé d'adopter à son tour Lucius Verus et Marc Aurèle. C'est à peu près l'ensemble des informations connues sur sa carrière. Portrait"D'une beauté remarquable, il avait un caratère agréable et de nombreux talents. Aristocrate jusqu'au bout des ongles, son comportement était empreint d'une grande dignité. Orateur de valeur, savant émérite, propriétaire foncier et éclairé, il était sobre, travailleur, aimable, généreux et respectueux du droit d'autrui. Toutes ces qualités étaient parfaitement équilibrées, et jamais il n'en faisait étalage. Pour cette raison, il jouissait du respect et de l'estime de tous les honnêtes gens, et l'on peut dire qu'il mérita d'être comparé à Numa Pompilius (Histoire Auguste : Antonin le Pieux, II. Numa Pompilius est le deuxième roi légendaire de Rome célèbre pour sa piété et son respect des lois divines)." Les sources concernant cet empereur sont trop peu nombreuses pour confirmer si ce portrait reflète fidèlement sa personne. Orateur talentueux, il est extrêmement riche avant même son accession au pouvoir, mais ne fait jamais étalage de sa fortune ni de son statut. MariageSon épouse, Faustine l'Ancienne, lui a donné quatre enfants, dont deux fils décédés avant son accession au trône. Parmi ses deux filles, l'une est morte pendant son proconsulat d'Asie, tandis que l'autre, Faustine la Jeune, a épousé Marc Aurèle. Antonin épouse Annia Galeria Faustina l'Ancienne entre 110 et 115. Sa mère, Rupilia Faustina, étant la belle-soeur de l'empereur Hadrien, Antonin devient ainsi le neveu par alliance de l'empereur. De leur union naissent au moins deux enfants : un fils, M. Galerius Antonius, mort en bas âge, et une fille, Annia Galeria Faustina la Jeune, qui épouse Marc Aurèle en 145 et décède en 175. Annia s'éteint en 141. L'Histoire Auguste mentionne à propos de cette épouse : "Il y eut beaucoup de racontars sur sa femme en raison de sa vie trop libre et facile, bruits qu'il étouffa non sans en souffrir intérieurement". Dies imperii : 10 juillet 138RègneLe 24 janvier 138, à l'occasion de son soixante-deuxième anniversaire, Hadrien déclare vouloir adopter Antonin, le désignant ainsi comme son successeur. L'adoption est officialisée un mois plus tard, le 25 février 138. Cette opération est complexe : Hadrien adopte Antonin, qui, simultanément, adopte Marcus Annius Verus, alors âgé de seize ans, et le jeune Lucius Ceionius Commodus, fils de Lucius Ceionius Commodus, précédemment choisi comme héritier par Hadrien, mais décédé deux mois auparavant. A la mort d'Hadrien, le 10 juillet 138, la succession s'effectue sans opposition, et de nombreux fonctionnaires conservent leurs postes. Grâce à sa bienveillance et sa modération, Antonin gagne rapidement l'estime du Sénat. La biographie d'Antonin le Pieux, rédigée par Julius Capitolinus, est encore plus succincte que celle d'Hadrien par Spartianus. En quelques pages, elle résume un règne de vingt-trois ans, nous laissant seulement ces mots, suffisants pour sa renommée, mais insuffisants pour notre curiosité : transiit benefaciendo, il a traversé son temps en faisant le bien. La manière dont Antonin a obtenu le surnom de Pius (dévot, vertueux) relève davantage de l'hagiographie que de l'histoire. L'Histoire Auguste (Antonin le Pieux, II, 3-7) propose pas moins de cinq explications à ce sujet : "Il reçut du sénat le surnom de Pieux, soit parce qu'il avait prêté, en présence du sénat, une main secourable à son beau-frère affaibli par l'âge (...), soit parce qu'il avait épargné des gens dont Hadrien, pendant sa maladie, avait ordonné le meurtre, soit parce que, après la mort d'Hadrien, il lui avait, contre les voeux de tous, décrété des honneurs innombrables et considérables, soit parce que, lorsque Hadrien avait voulu se suicider, il avait réussi par une vigilance et une diligence extrêmes à l'en empêcher, soit encore parce que sa grande clémence naturelle l'avait détourné au cours de son règne de tout acte cruel." Aurelius Victor relate les circonstances de l'adoption d'Antonin. ...Hadrien convoqua le sénat pour créer un César. Comme les sénateurs s'empressaient d'accourir à l'assemblée, l'empereur aperçut par hasard Antonin, qui, du bras, soutenait les pas chancelants d'un vieillard, son beau-père ou son père. Pénétré d'admiration à cette vue, Hadrien fait accomplir les cérémonies nécessaires pour l'adoption d'Antonin comme César, et il ordonne le massacre des sénateurs qui l'avaient tourné en ridicule. Après sa mort, le sénat, insensible aux prières du nouveau prince, refusa de décerner à Hadrien les honneurs de l'apothéose, tant il était affligé de la perte d'un si grand nombre de ses membres ! Mais lorsqu'il vit reparaître tout à coup ceux dont il déplorait le trépas, chacun, après avoir embrassé ses amis, finit par accorder ce qu'il avait refusé d'abord. Lors de son accession au pouvoir, Antonin refusa l'aurum coronarium offert par l'Italie et n'accepta que la moitié de ce que les provinces lui proposèrent. En conséquence, il dut puiser dans ses propres ressources pour couvrir une partie des gratifications destinées aux soldats et au peuple à cette occasion. Doté de goût et d'éloquence, il gérait son esprit comme sa maison, en maître soucieux d'un ordre parfait. Il écoutait attentivement, délibérait longuement et, une fois sa décision prise, s'y tenait avec fermeté, condition essentielle d'une bonne administration. Au consilium (conseil du prince), il privilégiait systématiquement les décisions les plus clémentes. Comme tous ceux que nous nommons les Antonins, il mena une vie davantage semblable à celle d'un riche particulier qu'à celle d'un empereur. Nous pourrions relater de nombreux actes de sa générosité, ses multiples libéralités envers des particuliers, le peuple de Rome et les cités des provinces, qu'il soutint ou embellit. De nombreuses inscriptions témoignent qu'il suivit l'exemple de son prédécesseur, notamment en achevant l'aqueduc initié par Hadrien dans la nouvelle Athènes. Durant son règne, qui maintient l'Empire à son zénith, le trait le plus marquant est sans doute son immobilisme. Aucune guerre, invasion ou crise économique ne vient perturber l'Empire. Les réserves de l'Etat croissent, les provinces prospèrent, et l'administration fonctionne efficacement. Bien que conservateur, Antonin adopte quelques mesures en faveur des esclaves et des prisonniers, réduisant la durée de la détention préventive et limitant l'usage de la torture. A cinquante-deux ans, Antonin jouissait d'une maturité épanouie, tout en conservant vigueur et énergie. Contrairement à l'activité parfois agitée et ostentatoire d'Hadrien, celle d'Antonin était discrète et mesurée. A l'opposé de son prédécesseur, il n'appréciait pas les voyages. Surnommé le Pieux, il gouvernait le vaste Empire romain depuis la capitale ou son palais de Lorium, à proximité. Au cours de ses vingt-trois ans de règne, il ne s'éloigna que rarement de Rome, hormis un bref séjour en Asie, une retenue que l'Histoire Auguste (Antonin le Pieux VII, 11-12) considère comme une vertu. Il affectionnait la vie d'un grand propriétaire terrien, administrant ses domaines de Lorium, Lavinium, Tusculum et Centumcellae. Hadrien, très impopulaire au Sénat à sa mort, était critiqué pour son mode de gouvernance itinérant, qui éloignait l'éclat et l'autorité du pouvoir des sénateurs, révélant ainsi l'insignifiance de leur influence. Ces derniers souhaitaient lui refuser l'apothéose, ce qui équivalait à le déclarer tyran et à annuler ses actes. Antonin s'opposa fermement à cette injustice, qui aurait par ailleurs remis en cause sa propre légitimité. Selon Dion, l'opposition sénatoriale céda face à la crainte de l'armée. Hadrien fut ainsi divinisé, et Antonin lui fit ériger un temple à Pouzzoles, lui attribua des flamines et institua un concours quinquennal en son honneur. L'apothéose et le temple relevaient de l'étiquette impériale, mais le refus des honneurs divins pour son père adoptif aurait gravement porté atteinte au prestige de la fonction impériale et affaibli la légitimité d'Antonin comme souverain. Soucieux de préserver le calme et l'ordre instauré dans l'Empire par son prédécesseur, Antonin s'inspira de la pratique de Tibère en prolongeant la durée des magistratures, mais de manière encore plus marquée. Il maintint en poste les fonctionnaires hérités d'Hadrien et, lorsqu'il dut nommer de nouveaux responsables, il privilégia des hommes expérimentés, souvent laissés, selon son biographe, à leur fonction jusqu'à leur mort. Ainsi, son ami M. Gavius Maximus dirigea les cohortes prétoriennes pendant vingt ans; Orfitus (Ser. Scipio Salvidienus Orfitus, nommé par Hadrien en remplacement de L. Catilius Severus) conserva la préfecture de la Ville aussi longtemps qu'il le souhaita, ne cédant son poste que sur sa propre demande; certains gouverneurs restèrent en place sept, voire neuf ans. P. Pactumeius Clemens, légat de Cilicie sous Hadrien, fut promu consul tout en conservant son commandement. Antonin a grandement contribué au droit civil, comme en témoignent les nombreux fragments de ses constitutions et rescrits conservés dans les Pandectes. Il améliora encore la condition des esclaves en décrétant que tout maître tuant son esclave pour un motif futile serait puni par la relégation ou la mort. De plus, celui qui maltraiterait excessivement son esclave serait contraint de le vendre, sans possibilité de le racheter ni d'inclure dans le contrat une clause permettant de continuer à exercer sa vengeance sur l'esclave passé sous la servitude d'un autre. L'ère des Antonins fut une période faste pour les architectes, marquée par des démolitions constantes suivies de reconstructions. Toutefois, il convient de préciser que, hors de Rome, les travaux étaient principalement réalisés par les cités prospères, financés par les revenus municipaux, les contributions des citoyens et, souvent, une aide impériale. Malgré la volonté d'Antonin de faire du bonheur public l'objectif central de son règne, certains sénateurs complotèrent contre lui. Aucune exécution n'eut lieu : Atilius Titianus fut simplement déchu de ses biens; Priscianus se donna la mort; Avidius Cassius, qui se rebella plus tard sous Marc Aurèle, nourrit au moins l'intention de renverser Antonin; enfin, Celsus, dont nous savons peu, entreprit une action suffisamment sérieuse pour que, vingt ou trente ans plus tard, Faustine la Jeune en évoque le souvenir auprès de son époux. Le Sénat s'employa avec zèle à traquer les coupables, mais Antonin mit fin à ces poursuites. En 148, Antonin célèbre avec faste le 900e anniversaire de la fondation de Rome, marquant neuf siècles d'une histoire riche, tumultueuse et souvent dramatique. Dans le domaine religieux, un point notable mérite d'être souligné : sous la Pax Romana et la tolérance impériale, les cultes orientaux, en particulier le christianisme, connaissent une expansion significative en Occident. La Pax Romana n'est que légèrement perturbée aux confins de l'Empire. Entre 141 et 143, en Bretagne, pour une raison obscure, Antonin renforce la frontière en faisant ériger un nouveau mur, plus au Nord que celui d'Hadrien, entre l'estuaire de la Clyde et le Firth of Forth, construit sur soixante kilomètres en mottes de gazon. En Egypte, entre 142 et 144, il réprime une révolte paysanne. Peu après, vers 145, des troubles éclatent en Maurétanie, en Germanie, ainsi qu'en Egypte, en Judée et en Grèce. Enfin, vers 156-157, il organise quelques expéditions militaires en Dacie. Sa diplomatie, appuyée par une concentration de troupes, permet de maintenir l'Arménie sous protectorat romain face aux Parthes, qui convoitent toujours cette province stratégique. Une monnaie frappée entre 140 et 144 montre Hadrien plaçant la tiare sur la tête du roi d'Arménie, accompagnée de l'inscription : Rex Armeniis datus. Antonin le Pieux n'est pas mû par l'ambition. Sans fils survivant, sa fille encore en vie a épousé Marc Aurèle, assurant ainsi la continuité dynastique. Peu auraient alors imaginé qu'il vivrait jusqu'à soixante-quatorze ans et régnerait plus longtemps que Trajan, Hadrien ou tout autre empereur depuis Auguste. Une fin paisibleAntonin arrivait à un grand âge : il avait dépassé soixante-quatorze ans, et, sans être pris d'aucun mal, ses forces diminuaient. Aussi faisait-on dans les temples des prières pour sa santé. En mars 161, une fièvre de trois jours l'emporta. Au moment d'expirer, il donna pour mot d'ordre au tribun des gardes : Patience et résignation, AEquanimitas. Mais quand lui-même fut mort, le sénat, pour conserver le souvenir de cette mutuelle affection, réunit les deux époux en consacrant le temple : Au dieu Antonin et à la déesse Faustine. Il en subsiste de magnifiques débris à San Lorenzo in Miranda, église construite dans le temple qui était l'objet de l'admiration des Romains. Antonin alla au-delà de l'attribution de prêtresses et de statues d'or à Faustine : il immortalisa son nom par la création d'une fondation charitable pour les jeunes Faustiniennes. Une médaille à l'effigie de l'impératrice représente, au revers, Antonin entouré d'enfants, avec l'inscription Puellae Faustinianae. Jusqu'à son dernier souffle, il soutint et développa l'institution des pueri alimentarii, qui préservait les familles pauvres du désespoir en les dissuadant de recourir à l'ancienne et cruelle pratique de l'abandon des nouveau-nés. Antonin, doté d'une constitution robuste et ayant préservé sa santé par des exercices en plein air et une vie saine à la campagne, conserve jusqu'à la fin ses pleines capacités physiques et intellectuelles. Il s'éteint à la suite d'un refroidissement, dans sa propriété de Lorium (à 18 km de Rome), le 7 mars 161, à l'âge de soixante-quatorze ans. La maladie qui emporte Antonin survient subitement; son biographe l'attribue à une consommation excessive de fromage des Alpes lors d'un dîner. Au cours de la nuit, il vomit et, le lendemain, une fièvre s'installe. Le jour suivant, son état s'aggrave davantage. Il se tourne pour s'endormir et s'éteint dans son cher palais de Lorium, près de Rome. La popularité d'Antonin est si grande que sa divinisation par le Sénat ne suscite aucune opposition. "Les hommes rivalisaient pour lui rendre hommage", rapporte-t-on. Ses dépouilles sont placées dans le mausolée d'Hadrien, aux côtés de celles de son épouse et de ses deux fils, décédés environ vingt ans plus tôt. La description succincte de ses funérailles fastueuses indique clairement que son corps fut déposé dans le mausolée d'Hadrien, sans mention de crémation. Il semble qu'Antonin le Pieux ait été l'un des premiers empereurs à adopter le rite alors en vogue de l'inhumation.  | 
	
